samedi 16 mai 2020

Aventures en Terre creuse

Illustration de Frank Frazetta.
Dans mon récent post consacré à L'Œil Noir, je m'interrogeais sur ce qu'il pouvait bien y avoir de proprement "germanique" dans le jeu de rôle le plus populaire outre-Rhin. Et, ce faisant, j'ai omis un morceau d'importance: Tharoune. 
La planète Dère – où se situe l'Aventurie, le continent qui accueille la plupart des aventures de L'Œil Noir – abrite une "Terre creuse" en son centre: Tharoune donc. Et ce monde de Tharoune n'est pas sans présenter quelques caractéristiques teutonnes assez... Comment dire ça... Nationales-socialistes?
Je préviens d'emblée. Les auteur·es de L'Œil Noir ne sont en rien des crypto-nazi·es. Absolument pas. Cependant force est d'avouer que Tharoune a des côtés très IIIe Reich, si si. Il s'agit donc d'une Terre creuse, dirigée par une caste de sur-hommes belliqueux et autoritaires, soit l'imaginaire mystique pseudo-nazi d'un monde creux abritant les ancêtres des Aryens.
Fort heureusement, dans L'Œil Noir, les PJ sont les "gentils" qui vont tenter de mettre à bas cette société dictatoriale afin que ses habitant·es découvrent, enfin, les vertus de la sociale-démocratie (ou de la démocratie-chrétienne, au choix). 
En France, le mélange Terre creuse/nazisme a donné un tout autre jeu de rôle.

Je connais une autre Terre creuse avec des nazis. De vrais nazis cette fois-ci, en uniformes et croix gammées, tout ça tout ça. Il s'agit de celle de Hollow Earth ExpeditionHEX pour les intimes.
Hollow Earth Expedition se déroule dans les années 30. La Terre est creuse et son centre abrite un monde luxuriant rempli de dinosaures, de ruines atlantes et de peuples hostiles. Les PJ sont des aventuriers·ères qui luttent vaillamment contre les nazis pour empêcher ces derniers d'acquérir plus de puissance en perçant les secrets de ce nouveau monde. Soit un mélange des aventures d'Indiana Jones et du Cycle de Pellucidar d'Edgar Rice Burroughs.

Entre 2010 et 2015, j'ai mené deux grosses campagnes à Hollow Earth Expedition, l'une en Belgique et l'autre en France. Les raisons qui m'ont fait aimer ce jeu sont les mêmes qui m'ont fait m'intéresser (énormément) à Rifts par la suite: le mélange des genres. 
Dans Hollow Earth Expedition, vous avez une base contemporaine (les années 30 et la montée des fascismes), du pulp (l'exotisme, les dinos, le monde tropical), de la S-F (les artefacts technologiques atlantes et les inventions rétro-futuristes des nazis et autres savant·es fou·folles), de la fantasy (les peuples antiques et fantastiques de la Terre Creuse), de l'Histoire (les populations humaines réfugiées en Terre creuse tout au long des siècles)... Et de l'Horreur puisque je n'ai pas pu m'empêcher de mettre de grosses louches du Mythe de Cthulhu dans ma marmite imaginaire: la plupart des PJ étaient professeurs à l'Université Miskatonic et devaient empêcher les nazis d'invoquer/réveiller/ressusciter un avatar de Nyarlathotep.
En plus de mettre du Mythe, j'avais aussi "installé" en Terre creuse des peuples howardiens: Cimmériens, Aquiloniens, Stygiens, Shemites, Pictes, Hyrkaniens... Pour rien, hormis le plaisir d'imaginer, puisque les PJ ne les auront guère croisés. Je me demande même si il n'y avait pas des extra-terrestres, plus ou moins "vancien·nes", installé·es en Terre creuse depuis l'époque glorieuse des Atlantes ? Et je m'attarde pas sur les races du Mythe, présentes elles aussi. 
Bref, c'était un joyeux bazar(punk) où je me suis bien fait plaisir.

Pourquoi je vous parle d'Hollow Earth Expedition maintenant? Avant-hier, je vous causais du dernier opus du Grümph: Ophéis. Je vous en disais le plus grand bien car ce (petit) jeu de rôle part d'une idée simple: se faire plaisir. 
Le Grümph y a mis plein de trucs qui le bottaient sans se poser de questions: des vikings, des samouraïs, des nain·es, des robot·es, des hommes·femmes-serpents, des gobelin·es pygmées, des dinosaures... Et encore, je pense qu'il s'est méchamment retenu. Si il avait eu plus de temps, allez savoir ce qu'il aurait mis en plus...

Dans Ophéis, j'ai retrouvé un peu de Hollow Earth Expedition, c'est-à-dire la possibilité de mettre un peu tout ce que l'on aime dans un jeu de rôle. Comme dans Rifts et Falling Sky me direz vous. Certes – chacun·e ses lubies – mais il y a quand-même de sacrées différences entre Rifts/Falling Sky d'un côté et Ophéis /HEX de l'autre. Et l'une de ces différences réside dans leurs sources d'inspiration. 
Rifts (et Falling Sky par ricoché) a des milliards de références mais, si il fallait n'en conserver que quelques unes, j'ai quand-même l'impression que ce jeu, ainsi que les autres publications Palladium Books, est très influencé par la BD et les Dessins Animés, américains et japonais. Un jeu de rôle très visuel en fait. J'en parlais dans mon blog d'Avant. (d'ailleurs il me semble bien que Kevin Siembieda voulait être dessinateur de comics avant de devenir créateur et éditeur de JdR)
Tandis que Ophéis et Hollow Earth Expedition s'abreuvent, selon moi, à une autre source imaginaire, plus ancienne: les magazines pulp de la première moitié du XXe siècle et l'image que l'on s'en fait. Ophéis se réclame de la Sword & Sorcery, texto, tandis que Hollow Earth Expedition lorgne méchamment du côté du récit d'aventure exotique. Soit des genres issus tout droit de ces magazines en mauvais papier.

Le bazarpunk ça mange à tous les râteliers!

Ein Volk, ein Reich, ein T-rex. Photo extraite de Iron Sky 2.

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