jeudi 9 avril 2020

"M le jeu de rôle", la genèse – 1re partie: Pierrebrune

Henri de La Rochejaquelein au combat de Cholet, 17 octobre 1793, peinture de Paul-Émile Boutigny, musée d'art et d'histoire de Cholet.
Pierrebrune n'est rien de moins que le tout premier jeu de rôle de l'Histoire. Oui, avant même M le jeu de rôle. Ou presque.

Pierrebrune est un lieu fictif,  une petite ville de Vendée (ou des Deux-Sèvres), imaginé pour expérimenter de nouveaux types de simulation de jeu de guerre avec figurines. À l'origine, Pierrebrune était un cadre conçu pour jouer des jeux d'escarmouche avec figurines des guerres de la Révolution et de l'Empire. Mais, en 1969, son auteur, David Judicieu, a commencé à expérimenter de nouvelles formes de jeu qui ont amené à la création du "jeu de guerre" Pierrebrune.
Dans Pierrebrune, les joueur·ses ne jouaient pas un contre un mais à plusieurs, et sans qu'il y ait forcément confrontation armée. Si la base était indéniablement un wargame ("champ de bataille", figurines, dés, règle, tour par tour, différentes phases de jeu...), David Judicieu avait introduit quelques innovations qui préfiguraient déjà le jeu de rôle tel qu'on le pratique aujourd'hui:
  • Il peut y avoir plus de deux joueur·ses (contrairement aux wargames classiques qui voient s'opposer deux adversaires).
  • Il y a un·e arbitre.
  • Chaque joueur·se interprète un et un seul personnage.
  • Les personnages sont des "habitant·es" de Pierrebrune. Ce ne sont pas forcément des combattant·es. On peut joueur le maire, le curé assermenté, la paysanne insurgée, le seigneur local, la tenancière de l'auberge, le soldat républicain encaserné, l'espion britannique, la contrebandière...
  • Chaque "personnage-joueur" – et oui, déjà! – doit atteindre un objectif précis pour remporter la partie.
Les références et influences de David Judicieu étaient assez classiques: les wargames anglo-saxons, des ouvrages consacrés à la stratégie, certains jeux de plateau et, surtout, Diplomacie, avec une phase de négociation entre chaque tour. C'est sur ces bases assez classiques que David Judicieu a peu à peu élaboré un nouveau type de jeu qui, sans être déjà du jeu de rôle, n'était plus vraiment du wargame.

David Judicieu dut improviser des règles au fur et à mesure que les joueur·ses accomplissaient des actions qui s'éloignaient de plus en plus du wargame et de Diplomacie. Si il n'était pas toujours convaincu par les dites règles, les joueurs·ses étaient ravi·es et en demandaient toujours plus. L'aspect interactif et très ouvert de Pierrebrune était, pour eux·elles, particulièrement enthousiasmant et libérateur.

Parmi ces joueur·ses se trouvait David Arnaud, l'un des futurs concepteurs de M le jeu de rôle. David Arnaud – je vous le présenterai dans un futur post – faisait office d'arbitre lorsque Judicieu était absent. On ne sait pas qui eut le premier l'idée que les joueur·ses conservent leurs PJ d'une partie sur l'autre. Judicieu? Arnaud? Un·e autre joueur·se? Mystère. Mais, si dans les premiers temps les PJ ne servaient que sur une seule partie, les joueur·ses finirent par garder des PJ auxquels ils·elles s'étaient attaché·es. Les deux David allèrent encore plus loin et commencèrent à faire jouer sans plateau ni figurines...

On n'était plus très loin du jeu de rôle.

Tout ce qui précède est pure fiction et Pierrebrune n'a jamais existé. Contrairement à Braunstein.


Journée tranquille à Pierrebrune...

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