vendredi 11 septembre 2020

[Apocalypse n°4] Carnage aux Caraïbes

♫ Zouk la sé sèl médikaman nou ni ♫
Couverture par Rolland Barthélemy.

"Après que la folie des hommes eut déclenché l'APOCALYPSE, vint le temps de l'obscurantisme : une régression aux instincts les plus bas, aux pulsions les plus barbares. De nouvelles générations biologiques naquirent, des mutations génétiques s'effectuèrent ; l'inconcevable devint quotidien. Il fallait réinventer le monde. L'état, nouveau et fragile, avait besoin d'aventuriers capables d'affronter l'innommable chaos. Russ Norton était le meilleur d'entre tous..."

Et voilà, Apocalypse c'est fini : je viens de lire le dernier tome de la série, Carnage aux Caraïbes. Enfin... Pas tout à fait le dernier puisqu'il s'agit du tome n°4, sur six volumes publiés. Mais, en ce qui me concerne, c'est mon dernier tome puisque j'ai déjà lu les cinq autres, dans le désordre. Et, franchement, on ne peut pas vraiment dire que je me sois gardé le meilleur pour la fin... Loin de là !

Car Carnage aux Caraïbes très mauvais. Le plus mauvais de la série, hélas.

Pour rappel : Apocalypse est une série de six romans de gare post-apo publiés entre 1987 et 1988. Une guerre nucléaire a ravagé les USA (et le reste du monde à priori) et, dix ans plus tard, les rares survivant·es encore sain·es d'esprit doivent survivre dans un environnement hostile, irradié et mutagène, rempli d'abominations génétiques improbables et de bouchers psychopathes. Aux USA, du moins dans ce qu'il en reste, l'État Libre d'Alamogordo essaie de reconstituer un semblant de civilisation. Son meilleur agent se nomme Russ Norton, un ancien des Forces Spéciales, plutôt associable et solitaire, contraint de bosser pour l'État Libre car celui-ci est le seul capable de fournir un environnement stérile à Nick, son fils de onze ans, atteint d'une forme rare d'immuno-déficience¹.

Carnage aux Caraïbes débute par l'attaque, au large d'Haïti, d'un cargo de l'État Libre, le Hammer, qui ramenait de la canne à sucre (produit de première nécessité dans un univers post-apo, comme chacun·e sait), embarquée à Fort-de-France, en Martinique (qui a donc survécu à la guerre). Les flibustiers sont des zombies, commandés par Toussaint Lenfermé (une référence pas subtile du tout à Toussaint Louverture), capitaine pirate ET mutant. Toussaint Lenfermé tient à un certain standing puisqu'il sévit à bord d'un galion "espagnol" du XVIe, ou XVIIe siècle, s'habille, lui et ses "hommes", comme un authentique pirate de l'époque et n'utilise que des armes de la même période. Une sorte de cosplayer post-apo.

Avant que son équipage ne soit entièrement massacré, le Hammer a le temps d'envoyer un ultime message à Alamogordo. L'État Libre n'est pas très content qu'on lui choure son sucre et envoie Russ Norton pour distribuer des claques aux responsables.

Ben oui, Carnage aux Caraïbes se déroule exclusivement en Haïti. Et l'Haïti d'Apocalypse n'est malheureusement guère différente, par certains côtés, de l’Haïti contemporaine... Russ Norton va très rapidement découvrir que Toussaint Lenfermé est aux ordres du président Duponnier. Oui : "Duponnier". Ne cherchez pas trop loin, le président Duponnier est un avatar de Jean-Claude Duvallier, "Baby Doc", président — et infâme autocrate — d'Haïti de 1971 à 1986, quand il est chassé du pouvoir. Jean-Claude Duvallier qui avait succédé à son père, François Duvallier dit "Papa Doc", président d'Haïti de 1957 à 1971. Une belle dynastie de tyrans affameurs. D'ailleurs les soldats zombies du "président à vie" Duponnier se nomment les "Tontons Macoutes", comme la police secrète des Duvallier...

Notez que Carnage aux Caraïbes a été écrit peu après la chute de Baby Doc. Un bouquin surfant sur l'actualité de l'époque ?

Donc Duponnier est un tyran sanguinaire, comme ses illustres modèles. Il règne sur les ruines de Port-au-Prince et Haïti (le reste de l'île d''Hispaniola, l'ancienne République Dominicaine, a sombré dans les eaux turquoises de l'Atlantique, pas de chance). Plus précisément, il règne sur la population blanche et mulâtre puisqu'il a entrepris de massacrer la population noire pour des raisons assez mystérieuses que le bouquin ne dévoilera jamais. 

Arrive Russ Norton, bien décidé à résoudre le mystère de la disparition du Hammer. Et comment se déroule son séjour en Haïti ?

ATTENTION DIVULGÂCHIS EN APPROCHE : Mal. Il vient d'abord en aide à des villageois·es noir·es attaqué·es par des Tontons Macouttes. Parmi les villageois·es, il y a la jolie Noémie qui décide d'accompagner Russ Norton à Port-au-Prince pour régler leur compte à Duponnier et Toussaint Lenfermé. Russ Norton et Noémie réussiront à traverser les ruines de Port-au-Prince, malgré les clochards végétaux carnivores, les flics-soldats zombies et les mutants crocodiliens égoutiers, jusqu'au palais, immense, bien gardé et luxueux de Duponnier.

Russ va découvrir que l'Haïti d'Apocalypse est à la pointe du génie scientifique déviant et que Duponnier, un monstre obèse abruti, a de grands projets, genre "conquérir le monde" (mouhahaha). Russ est fait prisonnier, s'échappe, défonce tout, poursuit Duponnier jusqu'en face de l'Île de la Tortue et en profite pour, juste derrière, faire la peau à Toussaint Lenfermé. Le bouquin se termine quand il entreprend de déshabiller la belle Noémie. FIN DU DIVULGÂCHIS.

Que dire d'autre ? Qu'il y a du vaudou, un soupçon d'érotisme lesbien, de la charcuterie (mais beaucoup moins que dans d'autres ouvrages de la série, comme si l'auteur n'y était pas), une galère gréco-romaine haïtienne (et ses esclaves révoltés), des mutants au look surprenant... Que Russ Norton révèle avoir les pouvoirs de Hokuto no Ken, quand il tranche avec sa seule main — et en un seul coup ! — deux mutants jumeaux siamois ! Et que, contrairement aux autres ouvrages, la scène de la couverture n'apparaît pas dans le bouquin (ou alors j'ai été inattentif parce que, bon, au bout d'un moment...).

À part ça, c'est mal écrit, mal raconté, incohérent, plat... Les autres ouvrages étaient loin d'être de la grande littérature mais c'était quand-même mieux que Carnage aux Caraïbes. Sur les vingt dernières pages, je lisais un peu une phrase sur deux... Bref, vous n'êtes vraiment pas obligé·es de vous le farder, sauf si, comme moi, vous souhaitez tout savoir de cet univers improbable et éminemment WTF.

Je suis quand-même un peu triste d'en avoir fini avec cette série déviante... Et serai content de les relire dans trente ans ! Si je les retrouve dans mon bazar...

¹ Voir les autres tomes, notamment Les parasites de l'horreur et Les hommes d'acier.
² Mais il y avait déjà des scènes semblables, dans d'autres ouvrages de la gamme, où Russ Norton tapait les points vitaux du bout de ses doigts musclés. "ATATATATATATATATATATATATATATA !!!" comme dit Hokuto no Ken.

Russ Norton va-t-il, enfin, pouvoir profiter d'un repos bien mérité au cours de son séjour dans les Antilles ?
(Réponse : à la fin, un peu, mais pour le reste il va en chier sévère)

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