Extrait de la couverture du tome 2 de la BD Mousquetaire. Par Ugo Pinson. |
Le médiéval-fantastique est, de très loin, le genre préféré de nombreux·ses rôlistes. Dans "médiéval-fantastique", il y a "médiéval". À priori, on parle d'univers de jeu ayant pour référence le Moyen Âge européen. À posteriori, de nombreux jeux dits "médiévaux-fantastiques" vont piocher leurs références visuelles dans les siècles qui suivent le Moyen Âge.
Parmi ces jeux "plus-tout-à-fait-médiévaux-fantastiques", je pense en particulier à Warhammer. L'Empire de Sigmar a comme modèle le Saint-Empire romain germanique au Moyen Âge tardif et à la Renaissance (c'est-à-dire les XVe et XVIe siècles). Je pense aussi à Laborinthus qui, sous couvert de proposer du "médiéval-onirique", nous balance des peintures et des photos qui me font surtout penser à la fin du XIXe et au début du XXe siècle (j'en parlais ici).
Plus proche de nous, mentionnons aussi Lamentations of the Flame Princess et Into the Odd. Lamentations of the Flame Princess est un clone de l'Ancêtre avec, comme PJ potentiels, des guerriers, des magos, des prêtres, des voleurs ainsi que des elfes, des nains et des hobbits. Mais Lamentations of the Flame Princess n'a pas pour cadre un avatar quelconque des Royaumes Oubliés ou du Monde de Greyhawk, que nenni. Lamentations of the Flame Princess prend place, pour partie, dans "une Europe fantasmée du XVIIe siècle" (merci le Grog).
Extrait de la couverture de Into our Odd. Par Maxime Plasse. |
Into the Odd va un peu plus loin dans le temps puisqu'il fait faire du dungeon crawling dans une cité – Bastion – inspirée des XVIIe et XVIIIe siècles européens. Voire plus récents comme le montre cet extrait de la couverture de Into our Odd, ci-dessus, où le personnage représenté est vêtu d'une tenue so XIXe siècle. Et d'autres éléments de Into the Odd – je pense en particulier à l'industrialisation – en font un jeu très steampunk dans l'âme. Chris McDowall, l'auteur de Into the Odd, est allé un peu plus dans le temps en publiant tout récemment Electric Bastionland, la suite de Into the Odd en quelque sorte puisque l'on y découvre une Bastion futuriste, ou quasi, avec l'électricité et des extra-terrestres. Mais les PJ de ce "Bastionland électrique" continuent de descendre dans des souterrains mal fréquentés pour en ramener les richesses qui y sont dissimulées. Du pur D&D dans l'âme...
Bref, vous pouvez mettre des donjons et des dragons (ou des tunnels et des trolls, des chevaliers et des sorciers...) dans vos parties sans obligatoirement vous en tenir à une charte graphique coincé entre 476 et 1492. Les anglophones n'ont pas ce problème de terminologie – ce n'en est pas vraiment un d'ailleurs... – puisque elles et eux parlent plutôt de "Fantasy", sans référence à une quelconque période historique.
J'ai un autre exemple, littéraire celui-ci, de mélange entre "Donj'" et un univers non-médiéval, c'est le très bon Perdido Street Station. Ce roman de China Miéville a pour cadre une gigantesque cité rétro-futuriste – New Crobuzon (quel nom horrible par contre), qui m'a énormément fait penser à la Londres victorienne – qui mêle, avec un sans gêne assez jubilatoire, des éléments fantasy, S-F, horrifiques, historiques... Un mélange comme j'aime. À un moment quelconque du récit, les héros et héroïnes recrutent trois "aventuriers" (guerrier-voleur-mago ou peu s'en faut, dans mon souvenir) pour lutter contre le danger qui menace les habitant·es de la cité. Et ces trois aventuriers sont d'authentiques dungeon crawlers: leur taf habituel consiste à explorer, et piller, des souterrains humides et mal fréquentés! Où l'on voit que China Miéville a fait du jeu de rôle...
Venons-en maintenant à M le jeu de rôle.
En tant que rôliste ET ancien étudiant d'Histoire, je ne suis pas raciste et la plupart des périodes historiques m'intéressent. Pour M, je n'ai pas de période de référence. Enfin si, j'en ai une, mais elle brasse très très large: de 1066 à 1929, à peu près.
Alors là, vous vous demandez peut-être comment caler des robes Charleston et des cottes de maille normandes dans le même univers?
En jouant avec l'espace.
Le monde de M est gigantesque. Dans mon idée, il s'agit d'un univers 1/ en mode "bac à sable", et 2/ créé en collaboration avec les joueurs et joueuses. En conséquence, il n'est pas nécessaire, ni même utile, de s'embêter à produire un background de 500 pages écrit en 8 car la seule partie de l'univers qui nous intéresse vraiment c'est celle où l'on va jouer. Du coup, je ne donnerai pas de chiffres de superficie ou de distance et resterai très vague sur les terres lointaines.
Retenez juste ceci: il y a dans l'univers de M de gigantesques métropoles, plus ou moins industrialisées, qui, visuellement, font référence au XIXe siècle et au début du XXe. Ces métropoles disposent d'une technologie rétro-futuriste avancée. Plus on s'éloigne de ces métropoles, plus le niveau technologique baisse. Et, avec lui, les références historiques s'éloignent dans le temps. Dans le passé, précisément.
Exemple. Représentez vous une cité populeuse (dix millions de sujets? Cent? C'est du JdR, on fait ce que l'on veut). Le cœur de cette cité et ses habitant·es ont un look "Années folles". Les faubourgs ouvriers de cette cité font plutôt 1815-1914. Quand on sort des faubourgs, la campagne environnante est très XVIIIe siècle. Et ainsi de suite... À plusieurs centaines, ou milliers, de kilomètres de cette cité, sur les marges extrêmes du "monde civilisé", les locaux et locales s'habillent comme les Français et les Anglais du XIe siècle (Hârn!). Au-delà de ces terres, c'est l'inconnu: tribus non-humaines, royaumes barbares, ruines anciennes, paganisme et animisme, faune et flore hostiles...
Mais rien n'empêche MJ, joueurs et joueuses de jouer avec ces repères spatio-temporels, de faire se cotôyer "terres inconnues" et domaines "civilisés" aux codes visuels plus récents. Une rivière peut séparer une ville humaine "Renaissance" d'un royaume féerique forestier, une chaîne de montagnes peut servir de frontière entre une désolation hantée par des démon·es et une république prospère très "XVIIe", une citadelle steampunk peut être entourée d'un marais à l'écosystème extra-terrestre, et cetera.
Voilà, c'est l'idée. Accessoirement ça me permet de disposer d'un panel particulièrement large, et riche, d'images pour illustrer mon jeu. Et j'aime ça.
Exemple. Représentez vous une cité populeuse (dix millions de sujets? Cent? C'est du JdR, on fait ce que l'on veut). Le cœur de cette cité et ses habitant·es ont un look "Années folles". Les faubourgs ouvriers de cette cité font plutôt 1815-1914. Quand on sort des faubourgs, la campagne environnante est très XVIIIe siècle. Et ainsi de suite... À plusieurs centaines, ou milliers, de kilomètres de cette cité, sur les marges extrêmes du "monde civilisé", les locaux et locales s'habillent comme les Français et les Anglais du XIe siècle (Hârn!). Au-delà de ces terres, c'est l'inconnu: tribus non-humaines, royaumes barbares, ruines anciennes, paganisme et animisme, faune et flore hostiles...
Mais rien n'empêche MJ, joueurs et joueuses de jouer avec ces repères spatio-temporels, de faire se cotôyer "terres inconnues" et domaines "civilisés" aux codes visuels plus récents. Une rivière peut séparer une ville humaine "Renaissance" d'un royaume féerique forestier, une chaîne de montagnes peut servir de frontière entre une désolation hantée par des démon·es et une république prospère très "XVIIe", une citadelle steampunk peut être entourée d'un marais à l'écosystème extra-terrestre, et cetera.
Voilà, c'est l'idée. Accessoirement ça me permet de disposer d'un panel particulièrement large, et riche, d'images pour illustrer mon jeu. Et j'aime ça.
Illustration pour HârnMaster. Par Eric Hotz. |
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